Louis Verret
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Malabar Express de Mario Picardo
au Fonds de dotation Weiss,
Commissariat Louis Verret
automne 2021
Mario Picardo est le premier résident du Fonds de Dotation Weiss. Il s’installe au 28, rue Paul Valéry le 18 octobre 2021. Il imagine consacrer sa résidence à la peinture d’une douzaine de toiles. Des grandes et des très grandes. Des cent quarante par deux mètres dix et des trois mètres par deux. Six de chaque. Les images qui s’y poseront sont décidées depuis quelques jours déjà. Les modèles proviennent d’un carnet initié au milieu de l’été. Le carnet est rempli au trois quart de dessins au feutre : des tracés rapides au couleurs vives, représentant des modules de jeux de plein air, des emballages de confiserie, des dos d’emballage de jouets, des semblants d’onomatopés, des figures de Tortues Ninja, se superposent et s’entremêlent. Dans la transposition des petits dessins en larges peintures, il veut que son “geste conserve la spontanéité et l’urgence avec laquelle l’enfant se défoule dans l’aire de jeux”. La livraison des châssis a du retard : elle est revue pour le 25 octobre. Du 20 au 25 octobre, Mario s’emploie à réaliser une cinquantaine de dessins au feutre à alcool sur les couvertures de sa publication à venir chez Topsafe : Shepherd's Bush doit être présentée au cours du vernissage de la résidence, le 2 décembre. Elle compile des aquarelles réalisées en août 2019 à Londres. Certains des exemplaires sont rapatriés en Angleterre dès le 22 octobre. Le 25 octobre les châssis entoilés sont livrés et répartis au premier étage. Au sol, sur des tréteaux ou adossés aux murs. Le 26 octobre il commence à peindre les fonds. La gamme colorimétrique est celle du goûter joyeux et joueur, ou plutôt de la sucrerie qui le sublime : le jaune et le rose du Malabar bi-goût, le vert-bleu de la glace à l’eau saveur menthe Yetigel, le marron lavé d’une glace vanille-chocolat fondue. “Qui colle au doigt et qu’on essuie sur le short de bain humide”. Le 28 octobre, Lilia, sa belle-fille de neuf ans, passe la journée à l’atelier. Il lui met papier et feutre à disposition. Elle réalise un dessin qu’elle titre Trump et la Carotte, représentant Donald Trump avec une haute chevelure blonde. Et une carotte aussi haute que lui. Le dessin est scotché à l’entrée de l’escalier et y reste jusqu’à l’exposition. Lilia passe quelques autres après-midi dans l’atelier. Il l’invite à réaliser des fonds pour des petits formats qu’il réalisera plus tard, fin novembre. Les paillettes, essentielles à l’étape de peinture suivante, ont du retard dans la livraison. Elles proviennent de Hollande. Du 27 octobre au 1er novembre il termine les dessins des couvertures des cent-dix exemplaires de Shepherd's Bush. Les paillettes arrivent le 5 novembre. Mario installe autour de lui les châssis dans l’ordre du programme. Il va peindre les grands formats les uns après les autres. Les formats plus petits pourront être travaillés en simultanée. Il peint à la lumière du jour jusqu’à 16h, puis allume les néons. Il joue des films depuis Netflix sur ses enceintes portables JBL, en version française. L’atelier est calme. La solitude lui va bien. Pour peindre il porte une chemise à manches courtes bleue foncée, un short de l’équipe de football d’Arsenal, des chaussettes bleues à pois rouges, des claquettes vert d’eau Adidas. Sur ses mollets, ses cuisses et ses avant-bras, de nombreux tatouages colorés. Au sol des ilots de bâches dépliées hébergent des cartons de paillettes, des pots métalliques de peintures vinyliques préparées sur mesure : rouge prosseco, bleu midouze, jaune citron, vert armor, jaune caillebotte, rose buto, etc. Des pots en plastique transparent de peinture polyuréthane bleu cyan, bleu cobalt, vermillon. Des petits pots d'émulsion vinylique flashe. Des boites de bonbons Haribo vides. Un compresseur. Des rouleaux de scotch bleu. Des pots en plastique et un bouquet de pinceaux. Des bouteilles de Perrier et de Volvic. Sur le bureau en bois, des exemplaires de Shepherd’s Bush, des feutres à alcool, une pile de papier, des dessins au feutre, son carnet Moleskine ouvert à la page de la peinture en peinture ou de celle à venir. Quelques cannettes de Coca zéro. Cà et là de grands cartons débordant de papier bulle. Mario se rend à la résidence cinq à six fois par semaine. Pour des sessions moyennes de dix heures. Il reçoit la visite de son galeriste, ses collectionneurs, de commissaires d’exposition, des fondateurs de la résidence Fanny et Julien, d’Antoine et trois desserts, de Romain le reprographe, du curateur et de son chien Nosferatu, de Julian qui aide à l’accrochage, de Sébastien des éditions RLD, de ses amis, de sa mère, de sa compagne Pauline et de sa belle-fille, Lilia. Le nom de l’exposition est arrêté le 15 novembre, dans l’après-midi : ce sera Malabar Express. Elle doit ouvrir le 3 décembre et se clôturer le 11. Le matin du vernissage, il neige. Durant cette période de résidence, autour du 28, rue Paul Valéry, les feuilles d’arbre ont bruni en passant par le jaune, puis sont tombées.